Le foramen ovale perméable (FOP) en plongée

Le foramen ovale perméable (FOP) en plongée

Si cet article vous intéresse, c’est que vous êtes simplement curieux ou concerné.e par le sujet. Il y a près de trois ans, on m’a détecté un FOP à la suite d’un accident de décompression léger. Sur le moment, c’est un choc. Quand on parle d’un organe aussi essentiel que le cœur, on a tendance à rapidement prendre peur, surtout quand on vous annonce qu’il s’agit d’une contre-indication à la pratique de votre activité préférée (qui dans mon cas est en plus mon travail). Les lignes qui suivent sont celles que j’aurais souhaité lire au moment où le diagnostic a été posé. Cet article ne remplace en aucun cas un avis médical : seul un professionnel spécialiste du sujet po威而鋼 urra vous conseiller !

Mais au fait, c’est quoi un FOP ?

Introduction au système cardio-vasculaire

Ceux qui ont quelques notions peuvent passer directement au paragraphe suivant. Pour les autres, voici quelques rappels utiles qui vous aideront à comprendre en quoi consiste le FOP et quels sont ses impacts pour la plongée.

Le système cardio-vasculaire est composé du cœur, qui agit comme une pompe, et de l’ensemble des vaisseaux sanguins. Il a une double fonction essentielle pour l’organisme :

  • l’apport d’oxygène aux cellules grâce au sang (et à l’intérieur du sang, essentiellement grâce à l’hémoglobine à laquelle se lie l’oxygène)
  • l’élimination des déchets, en premier lieu le dioxyde de carbone (CO2)

On distingue la petite circulation (ou circulation pulmonaire) de la grande circulation (ou circulation systémique). La petite circulation va permettre d’acheminer le sang chargé en dioxyde de carbone vers les poumons, au niveau des capillaires pulmonaires. A cet endroit, les vaisseaux sont nombreux et très fins ce qui permet des échanges de gaz efficaces : le sang se décharge en CO2 et se charge en oxygène. La grande circulation, elle, va faire le lien entre le cœur et les organes : elle leur amène l’oxygène dont ils ont besoin et récupère par la même occasion le dioxyde de carbone produit par le phénomène de « respiration cellulaire ». Nous avons donc affaire à deux circuits complémentaires qui ont le cœur pour point de rencontre.

Le schéma ci-dessous synthétise le système cardio-vasculaire. En rouge, le sang est chargé en oxygène et pauvre en CO2, en bleu il est pauvre en oxygène et riche en CO2. Au niveau du cœur, le sang riche en oxygène arrive de la petite circulation et s’évacue dans la grande circulation sur la partie gauche (donc à droite sur le dessin).

https://nataswim.info/images/articles/courir/syst%C3%A8me_cardio-vasculaire-2.jpg

Vous avez tendance à confondre veines et artères ? Petite astuce : retenez que les « veines » vont toutes « vers » le cœur. Si vous avez bien compris, vous savez désormais que dans la grande circulation, les artères sont les vaisseaux riches en oxygène alors que les veines sont riches en CO2, c’est l’inverse pour la petite circulation.

Le FOP, une maladie ?

Le fonctionnement normal du cœur suppose que le sang ne se mélange pas entre ses parties droite et gauche afin d’assurer correctement les échanges gazeux nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme. Cette étanchéité n’est cependant acquise qu’assez tardivement dans notre développement. En effet, il existe un passage entre les deux oreillettes du cœur présent naturellement lors du développement intra-utérin : c’est le fameux foramen ovale. Il n’est pas rare qu’il faille attendre deux ans après la naissance pour qu’il se referme complètement. Chez certaines personnes, le foramen ovale reste « perméable » : on parle alors de FOP.

image DAN

Plus d’une personne sur quatre est concernée ! Sauf cas exceptionnels, on ne parle donc pas de pathologie mais plutôt d’une variante dans la population. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’il y a des niveaux ou grades de FOP différents qui dépendent du diamètre et des conditions de son ouverture. Chez la plupart des personnes, la perméabilité reste faible et a lieu en cas d’effort physique spécifique. On estime que 6% de la population aurait un FOP considéré comme « grand ». Le FOP n’entraine dans la majorité des cas aucun symptôme dans la vie courante, bien qu’il puisse être associé à certains types d’AVC, de migraines ou… d’accident de décompression chez le plongeur !

Plonger avec un FOP

Commençons d’abord par une bonne nouvelle : plongée et FOP ne sont pas incompatibles, et de fait, l’immense majorité des plongeur.euses qui ont un FOP ne le sauront jamais, sans que cela pose le moindre problème. Il est néanmoins probable qu’un FOP augmente le risque d’ADD, en permettant le passage de bulles dans la circulation systémique au lieu de les éliminer dans la circulation pulmonaire. Toute manœuvre qui augmente la pression intra-thoracique (Valsalva, le fait de tousser ou d’aller à la selle…) va favoriser l’ouverture du FOP.

Si les études évoquent un risque d’ADD multiplié par 2 à 5, il convient d’office de relativiser ce chiffre : on parle ici en temps normal de 3,6 accidents de décompression pour 10 000 plongées, et de 0,84 pour 10 000 pour ce qui est des ADD avec atteinte neurologique (source : DAN). Plusieurs études insistent sur le manque de connaissances et de preuves quant au rôle du FOP dans les ADD. D’autres facteurs jouent un rôle sans aucun doute nettement plus important dans la survenue d’un accident de décompression : type de plongée effectué, condition physique générale, âge, fatigue, déshydratation…

Même si vous plongez régulièrement, il n’est pas nécessaire d’effectuer une recherche de FOP de manière systématique. Un examen vous sera probablement indiqué avant de replonger uniquement en cas d’antécédent d’accident de décompression. La recherche de FOP est rapide et consiste souvent en une ETT (échocardiographie transthoracique) avec épreuve de contraste : on injecte un produit détectable dans la circulation sanguine et on va observer si des bulles passent d’une oreillette à l’autre. On vérifie également le passage des bulles lors de la manœuvre du Valsalva. Pour ma part et comme pour la majorité des cas, ce n’est qu’au moment de cette manœuvre que le passage des bulles avait lieu. Notons que si un FOP vous est détecté suite à un accident, rien n’indique qu’il en fut la cause : il est à considérer comme un facteur de risque supplémentaire.

En l’état actuel des connaissances et dans une logique de minimisation du risque, 3 options s’offrent aux plongeur.euses chez qui un FOP a été détecté :

  • Arrêter la plongée sous marine (Argh…)
  • Plonger de manière conservatrice pour notamment limiter la formation de bulles : réduire la vitesse de remontée, se limiter à une plongée par jour, 30 mètres maximum, plonger au nitrox plutôt qu’à l’air, limiter strictement l’effort après la plongée…
  • Faire fermer son FOP

La fermeture de FOP en dernier recours

L’option de fermeture de FOP est la dernière à considérer. Elle ne vous sera généralement offerte que si vous êtes un professionnel du secteur ou si vous avez un FOP de très grande taille considéré alors comme facteur de risques dans votre quotidien pour les AVC notamment.

L’opération consiste couramment en la pose d’une « ombrelle », insérée par voie fémorale puis déployée entre les deux oreillettes. L’intervention se fait sous anesthésie locale, et peut être réalisée en ambulatoire. Après 3 à 6 mois de traitement sous antiagrégant plaquettaire (aspirine) et une échographie de contrôle, il est possible de reprendre son activité de plongeur normalement. On gardera toujours à l’esprit que cette opération ne supprime pas le risque d’accident de décompression.

Exemples de dispositif de fermeture de FOP

Dans mon cas et bien que travaillant comme instructrice de plongée, j’ai pris quelques semaines pour murir ma réflexion avant de sauter le pas. L’opération est rapide et bien maitrisée. Pour autant, cela reste une opération non dénuée de risques (<1%) sur un cœur en bonne santé, le tout pour des bénéfices qui sont très relatifs. Les résultats qui semblent démontrer une plus faible prévalence d’ADD chez les patients dont le FOP a été refermé concernent des échantillons de patients assez restreints et souffrent de biais. Par exemple, les patients étudiés ayant subi une opération de fermeture de FOP ont tout de même adapté leur pratiques de plongée pour réduire le risque. Ainsi, la communauté médicale reste partagée et il convient d’étudier au cas par cas le bénéfice-risque d’une telle opération.

En fin de compte, tout se résume au rapport risque/bénéfice, risque/coût et risque/faisabilité. Le FOP est l’un des nombreux facteurs de risque établis pour le DCS. Le DCS est extrêmement rare lorsque les techniques de plongée appropriées sont suivies. Bien que Honěk et al (8) montrent clairement que le DCS peut être ramené à des niveaux négligeables par la fermeture du FOP, le faible nombre d’événements DCS réels et le succès des méthodes de plongée conservatrices pour réduire l’incidence du DCS posent la question de savoir si le dépistage universel des plongeurs pour le FOP est bénéfique ou si la fermeture du FOP apporte un avantage clinique significatif chez tous les plongeurs avec un FOP. Bien que la ferme犀利士 ture du FOP soit certainement une option chez les personnes ayant des antécédents de DCS grave et de FOP, le fait de soumettre tous les plongeurs présentant un FOP à une fermeture doit être mis en balance avec les risques et les coûts potentiels de la fermeture du FOP. Pour les plongeurs professionnels qui effectuent des plongées fréquentes et techniques, la stratégie décrite dans l’étude actuelle peut être une option viable.

extrait traduit de « Screening and Risk Stratification Strategy Reduced Decompression Sickness Occurrence in Divers With Patent Foramen Ovale »David A. Orsinelli and Saurabh Rajpal J Am Coll Cardiol Img. 2022 Feb, 15 (2) 190–192

En conclusion, rapprochez-vous de votre médecin en cas de besoin ! Dans tous les cas si vous êtes concerné.e, sachez que vous n’êtes pas seul.e. Apprendre qu’on a un FOP quand on est plongeur.se est loin d’être drôle, mais ce n’est en aucun cas une fatalité.

Je vous laisse ci-dessous les liens vers les deux études les plus récentes trouvées sur le sujet (en anglais). N’hésitez pas en partager d’autres.

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